LE RÔLE INGRAT DU PROPHÈTE

   Qu’on le nomme voyant, clairvoyant, médium, channel, s’il est authentique, cet être agit comme un prophète.  En effet, la prophétie se définit comme un message verbal ou écrit divinement inspiré, qu’une personne reçoit par révélation ou par accès au Registre de la Vie, dit les Archives akashiques.  Sauf que tout un chacun a se petite idée bien arrêtée de ce que doit être un prophète, comme ce que doit être un maître, d’où il peut parfois, dans son incompréhension, malmener à tort un être avéré qui a très bien joué son rôle.  Celui qui a bien étudié l’histoire de l’humanité n’a pu que constater qu’un prophète apparaît habituellement dans une société, une culture ou un courant spirituel lorsqu’un groupe humain, plongé dans les affres de la vie terrestre, a besoin de s’entendre délivrer une bonne nouvelle, pour retrouver l’espoir, ou qu’il a besoin de se faire mettre en garde contre de possibles catastrophes qui pourraient subvenir d’après ce qu’il s’est attiré par sa conduite.

   Ainsi, en général, le prophète se présente, en émissaire divin, pour prévenir une collectivité d’une menace plus ou moins imminente dans l’espoir que ceux à qui il s’adresse lui porteront suffisamment foi pour changer le cours des événements.  Évidemment, en modifiant le cours des choses — par la transformation de leurs actes, de leurs pensées, de leurs sentiments et de leurs paroles — les membres de cette collectivité rendent ses prévisions erronées, ce qui était le but visé, l’éclairer pour la rendre plus sage.  En pareil, semblant avoir menti, le prophète peut être taxé d’imposture, ce qui ne présage rien de bon pour le prochain être de ce genre qui se présentera dans ce milieu.  Pourtant, dans le cas d’une catastrophe annoncée, le rôle du prophète8prophète consiste précisément à fournir des renseignements qui, par le choc qu’ils peuvent produire, amènent des gens à changer leurs choix et, du coup, à transformer leur destin.  Dans ce contexte, on pourrait dire que le plus grand prophète ne peut que s’exposer à donner l’apparence d’avoir menti.  Car, lorsqu’un être incarné vit une expérience, il ne peut savoir à quoi il a échappé, s’il a modifié son attitude ou son comportement.

   Le meilleur prophète, ce n’est pas celui dont le message s’accomplit inexorablement, mais celui qui parvient à éveiller une communauté et à l’aligner sur un destin plus lumineux.  Du reste, toute prophétie peut procéder de deux ordres : si elle émane du Registre des certitudes, correspondant au Plan divin éternel, elle ne peut que s’accomplir sans possibilité d’altération;  mais il en va bien autrement si elle est tirée du Registre des probabilités.  Ces explications aident à mieux comprendre ce qu’a dit de la prophétie le Grand Maître Sri Aurobindo Ghose : «Quant à la prophétie, je n’ai jamais rencontré ni connu un prophète, si réputé soit-il, qui ait été infaillible.  Certaines de leurs prédictions se réalisent à la lettre, d’autres pas : elles se réalisent à moitié ou font complètement long feu.  Il ne s’ensuit pas que le pouvoir de prophétie soir irréel, ni que les prédictions exactes puissent toutes être expliquées par la probabilité, le hasard ou la coïncidence.  La nature et le nombre de celles qui ne peuvent pas l’être sont trop grands.  Le caractère variable de la réalisation peut s’expliquer soit par un pouvoir imparfait chez le prophète, parfois actif, parfois impuissant, soit par le fait que les choses ne sont prévisibles qu’en partie, ne sont déterminées qu’en partie ou encore par différents facteurs ou lignes de pouvoir, par différentes séries de potentiels et d’actualités.  Tant qu’on reste en contact avec l’une de ces lignes, on prédit avec exactitude, pas autrement;  et si les lignes de puissance changent, les prophéties déraillent également.»

   Au chapitre de la prophétie, la vérité réside en ceci : au crédit des prophètes, il faut signaler que l’être humain peut modifier toute annonce du futur, surtout si elle se démontre menaçante pour lui, ce qui devient son intérêt.  L’ordre de la prophétie n’est jamais d’annoncer la certitude de l’accomplissement d’une fatalité, mais de prévenir ou d’avertir, pour que les gens dûment avertis assument leurs responsabilités et lui échappent.  De ce fait, peut-être que le prophète qui semble se tromper le plus souvent identifie celui qui a vu le plus juste et qui a le mieux réussi à transmettre son message, en faisant une puissante impression dans des consciences qui ont choisi de se prendre en main et de modifier la trame de leur.  Hélas, trop d’êtres humains se contentent de ranger les avis des prophètes au fond de leur mémoire, comme des bonnes paroles propres à satisfaire l’âme, omettant de s’en servir pour orienter autrement leur quête spirituelle sur la Voie évolutive.

   Le meilleur cas d’espèce, pour ce qui a trait à l’humanité, c’est le texte de l’«Apocalypse», rédigé par Jean, le disciple de Jésus qu’on a toujours cru son préféré — une valeur symbolique qui s’explique par le fait qu’il représentait l’incarnation du Rayon de l’Amour pur — suite à des révélations directes de son Maître, après son ascension.  Cette partie de «Nouveau Testament» des Chrétiens, qui signifie «Révélation», a toujours été considéré comme un avertissement sévère et implacable servi à l’humanité par rapport à sa fin catastrophique au terme du dernier cycle évolutif d’environ 26 000 ans.  Pourtant, parce qu’ils avaient dûment été prévenus, plusieurs membres de l’humanité ont décidé qu’il en serait autrement et ils se mirent au service de la Lumière divine dans l’espoir de changer le destin de leur espèce.  Et ils ont si bien réussi qu’à la fin du siècle dernier, après avoir repris les rênes de la planète, en 1987, le Créateur émit un nouvel édit qui annula l’antique message et changea du tout au tout le destin des hommes, éliminant la majorité des catastrophes annoncées pour induire dans une Ère d’Ascension et de Grâce.

   Cependant, il faut savoir que l’«Apocalypse» représente moins un document évoquant la Fin du Monde que l’histoire de l’évolution individuelle de l’être humain.  Certains exégètes l’interprètent à tort comme l’annonce d’une période de bouleversements terrestres dramatiques qui devraient accompagner la Parousie, puisqu’une telle destruction n’a jamais répondu à aucune nécessité.  Le Créateur, qui a créé l’homme à son image et à sa ressemblance, ne pouvait vouer cette créature à un destin aussi précaire sans se désavouer dans son entreprise.  En réalité, cet écrit éclaire symboliquement les transformations intérieures qui surviennent dans les domaines de la pensée, du sentiment et des attitudes au fur et à mesure que la Nature inférieure (le Monde de la Forme ou de la Substance) s’élève vers la réalité du Soi divin.  À travers ces changements, opérés par la Lumière intime, chacun devient mieux à même d’expérimenter plus d’amour, de paix et de joie qu’il n’en a jamais connu.

   Ainsi, au premier chef, l’«Apocalypse» décrit un temps ou une phase d’extrême confusion où tous les êtres sont amenés à se dévoiler tels qu’ils sont en eux-mêmes, sans la moindre possibilité de tricherie, pour permettre à leur Essence d’affirmer son potentiel divin de transfiguration dans leur Nature.  Mais il ne se produira à travers les catastrophes qu’au fond des cœurs des endormis, ces paresseux ou léthargiques, ces êtres insensibles à leur propre Source d’amour.

   Pour qui veut  vivre la transformation intérieure sans heurt, il suffit d’acquiescer à la Vérité du Maître intérieur, que chacun est trop porté à réprimer et à étouffe la voie en lui, au lieu d’attendre la venue du Messie ou d’un Maître de Lumière extérieur qui pourrait procéder à un salut par procuration.  Ainsi, l’«Apocalypse» visait à révéler des réalités mystérieuses de l’Évolution naturelle, notamment des prophéties relatives à des temps à venir, à l’évolution de l’humanité.   Mais, ce texte prévient davantage de la fin d’un monde, du terme d’un cycle évolutif et d’un jugement particulier, que de la Fin du Monde et du Jugement dernier.  Il prévient de l’avènement de l’Ère du Verseau, un âge de rénovation, qui permettra progressivement une transformation de la conscience, l’Ascension collective et l’accession à l’immortalité physique.  Elle résume le développement de l’être incarné, de son état d’aspirant jusqu’à sa lutte finale, appelée la dernière sédition.  On ne peut interpréter ce texte à la lettre puisque les événements y sont volontairement mélangés, comme dans un jeu de cartes lancé sur une table, pour confondre les imposteurs et les téméraires.

© 2012-15, Bertrand Duhaime (Douraganandâ)  Note : Autorisation de reproduire ce document uniquement dans son intégralité –donc sans aucune suppression, modification, transformation ou annotation, à part la correction justifiée d’éventuelles fautes d’accord ou d’orthographe et de coquilles– veillant à en donner l’auteur, Bertrand Duhaime (Douraganandâ), la source, www.facebook.com/bertrand.duhaime, un relai du site www.lavoie-voixdessages.com, et d’y joindre la présente directive, en tête ou en pied de texte.

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