LA CULTURE DE LA VRAIE JOIE…

   On définit généralement la joie comme le sentiment de bonheur intense, mais passager, un sentiment exaltant, agréable et profond ressenti par toute la conscience, qui résulte surtout d’une aspiration atteinte ou d’un désir satisfait.  Tandis que le plaisir exprime le mouvement de l’ego insatiable qui demande satisfaction de ses besoins, la joie traduit l’état de grâce intérieur qui inclut la paix et le détachement procédant de l’illumination par l’Esprit qui active le cœur et rapproche de l’État christique.  Au-delà de la joie, il existe, par la Fusion en Dieu, l’état de béatitude ou de félicité qui exprime le Bonheur absolu de l’Être réalisé dans sa Lumière spirituelle.  Ainsi, dans la démarche évolutive, le Bonheur suprême procède de la quête du plaisir à celle de la joie et de la joie à la béatitude.  Le plaisir est du ressort des sens;  la joie, des sentiments ou de l’âme;  la béatitude, de l’Esprit divin.

  Ainsi, dans la hiérarchie du bonheur, on parle du plaisir des sens, de la joie de l’âme et de la félicité de l’Esprit.  Mais la vraie joie constitue une expression de la libre circulation de l’énergie vitale de l’âme et il traduit la circulation libre, sans contrainte, de l’amour.  De ce fait, ce vif sentiment de satisfaction intJOIEérieure révèle le degré de lumière et d’équilibre que porte un être.  Il est gai parce qu’il ne craint pas de perdre quoi que ce soit, vivant sans attente.  Le plaisir exprime le contentement des sens, la satisfaction de voir ses désirs réalisés et ses besoins comblés.  Il relève de la sensibilité et des sentiments.  Alors que la joie exprime l’enchantement de la conscience, la félicité ou la béatitude exprime l’ivresse ou l’extase de l’âme qui se fond dans l’Esprit.

   Quoi qu’il en soit, pour parler de joie, il faut parler d’un état qui coule de pure source, qui provient de la révélation même de Dieu qui sait se déguiser diversement autant dans les Ombres que dans la Lumière de sa Création.  Elle donne le signe évident que la Lumière divine habite un être, qu’elle est heureuse d’y habiter, que l’être vit dans l’enthousiasme.  Pour atteindre cet état, il faut connaître Dieu, se pénétrant de la certitude qu’il connaît toutes ses créatures, y compris soi-même, et qu’il les aime toutes.  La vraie joie découle de la dévotion à l’Être suprême.  La vraie joie est sereine.  Elle n’a rien à voir avec les accès émotifs.  C’est l’expression du Feu sacré qui traverse l’âme et lui donne de l’expansion.  L’être joyeux transmute tout mal en bien parce qu’il ne voit que le bien partout.  Aucune calamité ne l’ébranle profondément, même si sa compassion s’émeut du sort de ceux qui en ont été les malheureuses victimes.  Il voit en tout le jeu amoureux de l’Action-Réaction et de l’Amour.

   À titre d’attribut de l’âme, la joie révèle le degré de lumière qui habite un être capable de servir sans craindre de perdre quoi que ce soit.  Elle exprime le contentement serein qui découle du fait de favoriser la connaissance spirituelle et l’évolution de la conscience.  Elle traduit un état d’harmonie intérieure et elle permet de jeter un regard neuf sur le monde.  Elle est le premier fruit de l’amour véritable.  La joie, c’est la musique de l’âme, que l’on peut changer tout au long de sa journée.  Mais comment peut-on être joyeux si on ne sait pas ce qui rend heureux ?  Comment peut-on être heureux si on s’absorbe complètement dans l’accomplissement de ses tâches quotidiennes, repoussant vers un futur incertain tout ce qui plaît ?

   En vérité, la joie commence dans l’ici maintenant quand on fait ce qui assure son bien-être.  On découvre la joie en s’adonnant à des activités plaisantes qui relèvent de l’âme au lieu de renforcer la personnalité, car l’ego est infiniment exigent.  Les obligations que l’on s’impose ne rapprochent pas de ses objectifs les plus élevés et de son but ultime.  Pour leur part, les activités orientées par l’âme gardent le but élevée à la conscience et en rapprochent sans cesse l’atteinte.  Pour être heureux, il faut écarter toutes les énergies qui détournent régulièrement l’attention, au long de la journée, empêchant d’être à l’écoute de ses messages intérieurs.  C’est souvent le cas du téléphone, des corvées domestiques, du travail professionnel, du bavardage, des émotions d’autrui.

La joie n’et pas le sentiment qui accompagne une période festive, elle est l’énergie douce et regénérante qui réside au cœur de chaque instant, d’où elle ne se cueille que dans le moment présent.  Elle peut comporter une part de satisfaction sensuelle, mais, comme on l’a dit, elle surgit d’abord des délices de l’amour.  Certes, on ne peut être heureux que si on récupère sa liberté en agissant en accord avec les directives intérieures, en accord avec ce qui aide à reconnaître qui on est.

   À l’inverse, on s’écarte de la joie en se laissant prendre dans les mirages, en s’enlisant dans ce qui est placé devant soi, en se laissant piéger par ce qui attire, au lieu de trouver son centre et d’attirer ce qui est en harmonie ave son Être intérieur.  Agit-on de telle manière que les autres s’attachent à soi et remplissent ainsi son emploi du temps ?  Refuse-t-on d’agir comme on le souhaiterait ?  Cela ne mène pas à la joie !  Il faut avoir assez de compassion pour soi-même et de liberté intérieure pour faire ce qu’on aime au lieu de se sentir des obligations envers les autres, de se sentir indispensable, de devenir prisonnier des situations.  Il faut éviter de se laisser juger par ses propres créations, de se laisser emprisonner par les détails de leurs formes, pour se laisser porter par elles.  On gagne toujours à cesser de perpétuer les situations qui ne procurent pas de joie.

   La joie représente une attitude de légèreté intérieure qu’on développe en apprenant à regarder à travers les fenêtres de son âme.  Elle résulte de la présence de l’Amour pour soi-même et pour tous les autres.  Elle naît d’un sentiment de paix, de la capacité à donner et à recevoir, de l’appréciation de sa propre individualité et de celles des autres.  Elle traduit un état de gratitude et de compassion découlant d’un sentiment d’union avec son Être intérieur.  Elle amène à vivre dans un environnement bénéfique et fécond dans lequel son esprit peut s’épanouir.

   Pour ce qui concerne la joie, tout commence dans la connaissance de qui on est vraiment au niveau de la Lumière divine, soit par une exploration de son Être supérieur qui infuse la véritable connaissance et la sagesse profonde.  En écoutant les directives de son âme, un être est mis en contact avec les informations que détient l’Univers pour devenir un canal de vitalisation et d’amour.  Les situations qu’il juge présentement difficiles trouvent leur solution avec grâce, découvrant de nouveaux défis merveilleux, pour autant il s’ouvre à des idées nouvelles et accepte de se surpasser.

   Jusqu’à un certain point, la joie ne peut commencer que dans le respect de soi et des autres qui écarte les conflits.  Car on ne peut être heureux si on laisse inconsidérément la porte ouverte aux soucis ou aux émotions des autres.  On ne peut être heureux si on laisse une conversation s’éterniser quand on voudrait qu’elle cesse.  On ne peut être heureux si on écoute des histoires qui abaissent son énergie.  On ne peut être heureux si on prend des rendez-vous alors qu’on n’en a pas vraiment le temps ou qu’on n’en voit pas l’intérêt.  On ne peut être heureux si on se sent obligé par les autres ou si on se laisse piéger par des situations qu’on a crées.  On ne peut être heureux si on s’impose d’aimer tous les êtres en refusant de prendre en considération leurs actes et leur nature.  On ne peut être heureux que si on vit des situations qui élèvent sa pensée et aident les autres à entrer en contact avec des visions plus nobles.  Autrement, on perd son temps et on mine son taux énergétique.  On ne peut être heureux à aider sans cesse les autres si on se sent frustré à le faire.  On ne peut être heureux à s’imposer d’écouter les malheurs de ceux qui s’accommodent de leur vie telle qu’elle est.  On ne peut être heureux à aider quelqu’un qui ne veut pas évoluer, qui n’est pas prêt à recevoir son aide.  On ne peut pas être heureux si on se refuse la première place dans sa propre vie.

   Dès qu’on cesse de vivre avec un agenda trop rempli, des obligations et des responsabilités qu’on n’a pas envie d’assumer, de résister à ce qu’on ale plus envie de faire, on voit une voie se tracer devant soi à travers les activités les plus ordinaires.  En se centrant sur son but, plutôt que sur ses corvées et ses problèmes, on découvre des indices simples et évidents, très agréables, qui indiquent la voie à suivre.  Ces indices sont si naturels qu’ils ne paraissent pas toujours liés à la vision que l’on se forme.  Mais ils le sont, même s’ils ne répondent pas à ses critères logiques d’être trop sérieux et responsable.  Dès le réveil, chacun sait ce qui lui appartient de la joie et du plaisir, de son lot de bonheur.

   Alors, pour entrer dans l’état de joie, il s’agit de sourire à la vie au lieu de se concentrer sur la façon dont on passerait la nouvelle journée, de se concentrer sur les problèmes auxquels on devra faire face.  Mais surtout, la joie surgit du fait de chercher à mieux se connaître et à être pleinement par ses propres moyens.  Ainsi, on ne peut qu’apprécier davantage ce qui s’ajoute à ce qu’on se donne.  L’évidence de ce qui est à faire vient de la force de sa motivation à le faire, de la simplicité de la chose et du sentiment de joie que l’on ressent à y penser ou à le faire.  La joie croît dans la mesure qu’on s’estime soi-même, qu’on sait donner et se donner, qu’on sait développer sa capacité à recevoir autant qu’on donne.

   Pour connaître la joie, il faut savoir ce qui rend heureux et cesser de remettre ces instants de joie à demain, trop absorbé dans ses tâches quotidiennes ou empêché par un esprit pantouflard.  En outre, il faut vivre dans l’instant présent, non projeté dans le passé ou le futur.  Il faut discerner entre les activités de la personnalité et celles de l’Individualité. La personnalité recherche la distraction des sens, les jeux de pouvoir, la valorisation, la concurrence, la performance, l’activisme, les devoirs, autant de choses qui empêchent de capter ses messages intérieurs.  L’Individualité invite à rompre avec ce qui attire la sensibilité pour trouver son Centre intime, pour attirer ce qui est en harmonie avec lui.  Méditer le matin et le soir apporte beaucoup plus que les inquiétudes inutiles.  Quand cela ne va pas, on doit trouver des raisons de faire les changements qui s’imposent tout de suite.  Il faut cesser de croire qu’il faut mériter quelque chose, ce qui ne signifie rien.

   Pourquoi tolérer ce qui n’apporte pas la joie qu’on souhaite ?  On devrait n’accomplir que ce qu’il y a de meilleur pour soi et pour les siens, mais en se choisissant en premier.  On devrait employer son temps d’abord pour soi, en vivant ce que l’on conçoit de meilleur pour soi ou en s’adonnant à ses activités favorites.  Car ce qui n’est pas accompli pour son plus grand bien personnel ne peut l’être pour les autres, pour la planète, pour l’Univers, pour le Cosmos.  Du reste, ce que l’on préfère, avec ses désirs profonds, c’est la voie que trace son Être intérieur vers plus de joie.  Dans le désir présent s’esquisse la prochaine étape évolutive à franchir.

   L’être joyeux, parce qu’il est d’abord serein, n’a pas peur de perdre des objets, des biens, de voir partir des êtres, de voir passer la vie, un phénomène cyclique pour lui naturel.  Il n’envie ni ne jalouse personne car il sait lui-même pouvoir obtenir, directement de la Source, tout ce dont il a besoin.  Il ne compare pas et ne se compare pas: il trouve l’herbe aussi belle dans son champ que dans celui des autres.  Il ne convoite pas les facultés et les accomplissements des autres car il n’émule personne, n’entre en concurrence avec personne, ne cherche pas à être utile, performant ou productif.  Il désire être toujours davantage, tout simplement.  Il sait détenir tous les moyens et tous les instruments dont il a besoin pour s’accomplir et les recevoir dans l’ordre, en harmonie avec les normes de l’économie cosmique et universelle.

   L’être joyeux reste simple, digne et fier.  Il se réjouit du succès des autres, y voyant un avantage pour toute la collectivité.  Il ne souhaite que se dépasser lui-même, aller toujours plus loin dans son intimité avec Dieu.  Sa joie est un jaillissement spontané, marqué d’un sain détachement: il la concilie avec l’ordre et l’équilibre.  Il sait sourire franchement, se montrer avenant, sans tomber dans l’empressement servile, la flatterie, la familiarité avilissante.  Encore moins dans la condescendance.  L’homme joyeux ne redoute personne.  Il voit partout des auxiliaires de Dieu.  Pour l’être joyeux, il n’existe dans les hauts et les bas de la vie, que des occasions de croître dans le bonheur.  Tous les événements et toutes les circonstances favorisent le Savoir spirituel et l’évolution.  Ainsi, l’être heureux ne craint aucune force sur aucun plan.  Travaillant avec Dieu, il sait que tout le supporte et le protège.  Sa joie est égale et il la communique par son rayonnement discret à ceux qui l’approchent.  Il sait s’adapter à la conscience de chaque individu.  Sa joie naît de son union avec Dieu, la Source de la félicité.

   La joie est un état d’esprit, plutôt d’être, non un sentiment.  C’est un ressenti profond, une qualité de l’âme, qui s’exprime quand le mentJOIE-1al s’aligne sur la vision intérieure.  Elle s’exprime dans la paix et l’élévation, faisant découvrir le sens collectif et le bien commun.  Sri Aurobindo Ghose disait: «La joie est le secret.  Apprends la joie pure et tu apprendras Dieu.»

   En principe, rien ne s’oppose à la quête du plaisir et de la gaieté, mais celle-ci peut entraîner rapidement dans l’excès, le débordement, la dispersion.  La joie révèle la maîtrise de soi et la compréhension du sens de la vie.»La gaieté, c’est la complaisance dans la distraction, et le rire c’est l’exaltation de la complaisance: l’extase de la distraction: c’est pourquoi il abonde, comme dit Virgile, dans la bouche des sots: «Risus abundit in ore stultorum.»  En effet, le rire exprime une réaction de surprise, un accès émotif, donc un déséquilibre, un manque de maîtrise sur soi.  Par bonheur, il dilate la rate et il dissout les blocages, désamorçant les situations difficiles, d’où il faut éviter de déprécier l’humour qui, parfois, devient aussi important que l’amour.  Sauf que l’homme joyeux l’est parce qu’il n’entretient aucun blocage puisqu’il sait orienter ses sentiments et diriger ses énergies.

   En passant, disons que, dans un rêve, l’«état de joie» révèle qu’on traverse une phase d’enthousiasme, le désir d’y parvenir ou l’impuissance à y arriver.  En outre, dans les contes, le «cri de joie» témoigne de l’exubérance de la vie.

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