LE «NAVARATRI», LES «NEUF NUITS» OU LE FESTIVAL DE DOURGA, LA MÈRE DIVINE… 

   Comme tous le savent probablement déjà, l’animateur de ce site a accepté, comme Guide principal, la Sublime Dourga.  Ainsi, peut-être les lecteurs habituels ou de passage apprécieront-ils de connaître l’influence de cette Déesse, la plus Puissante du panthéon hindou, la seule Divinité féminine appelé à une vénération individuelle, sans référence à d’autres Divinités, qui résume bien la Tradition spirituelle originelle, dans les aventures des apparentes Divinités multiples qui ne représentent, au fond, au regard de la Tradition originelle, que des aspect de «Paratparam Paratparam», la «Perfection des Perfections» ou  l’«Être unique au-dessus…» de toutes les autres Divinités ou leur Source une et unique, même si la masse populaire a fini par établir une croyance en une infinité de Divinités.  Car, à travers son histoire, ils saisiront les expériences d’apparence parfois sombres et tourmentées que peut vivre, à l’occasion, ledit animateur et auteur de ces lignes, qui n’a pas intérêt à s’apitoyer sur son sort, à en tirer une valorisation de son ego ou à tenter de mener des jeux de pouvoir, ce qui lui vaudrait les foudres de sa Divinité d’élection, la Souveraine de l’Amour pur et de la Pureté d’intention.  C’est la Régente céleste qui fait passer par les aspects les plus sombres du Sentier initiatique afin de démontrer que, qu’un être prenne le Sentier lumineux ou le Sentier ténébreux, les deux finissent, à leur terme, par ramener au Foyer originel.  Elle l’amène encore à attester le fait que l’être humain, conçu à l’image et à la ressemblance de son Créateur, peut finir par vaincre tout dilemme ou à remporter toute épreuve.   Sauf que ce Périple sur le Sentier ténébreux, dans le long Labyrinthe du sombre Tunnel qu’elle fait explorer, qui n’est pas un appel à commettre le mal, mais à étudier et à maîtriser l’opposé de la Lumière, que peu ont la force et le courage d’affronter sans peur ni culpabilité, avec les conséquences indissociables de s’exposer à des errances dans les méandres de ces Dédales initiatiques.  Car, à l’occasion, cette démarche peut impliquer de grands désarrois, de grandes douleurs et de grandes souffrances, qui conduisent à mieux discerner le Bien du Mal, à mieux asseoir sa Maîtrise spirituelle et à mieux reconnaître la Voie du Juste Milieu, bien qu’elle amène à développer des compétences spirituelles tout à fait exceptionnelles et confère une plus grande conscience de la Totalité divine en Manifestation.  (L’illustration qui accompagne, plus bas, à gauche, offre la représentation classique de Dourga.)

   Le Grand Maître a dit : «Nul ne peut aller au Père que par le Christ… qui a vu le Fils a vu le Père… car le Père et le Fils ne font qu’un.»  Mais il faut bien comprendre, en sous-entendu, que nul ne peut-être le Fils sans être passé par la Mère, car c’est de la rencontre du Père et de la Mère que naît le Fils.  Au cours de l’ère patriarcale à travers laquelle l’Humanité vient de passer, les religions ont accDourgaIIordé une grande attention au Père, certaines d’elles ne trouvant même pas de place pour la Mère dans la Trinité divine.  Dans cet âge sombre, guidés par le mental, les êtres humains ont surtout privilégié les aspects matérialistes de la vie, désireux de s’édifier un paradis artificiel, les grandes questions métaphysiques se retrouvant la plupart du temps relégués au dernier plan, leurs motivations gravitant surtout autour des éléments de la survie, du confort et du bien-être.  Aussi, dans leurs élans religieux ou moraux, plus souvent artificiels et superficiels, ont-ils grandement valorisé la notion de Père, cherchant plus à agir, à faire, à paraître, à acquérir, à créer, à façonner, à construire, à dominer, à jouir qu’à être.

   Et voilà, le danger réside justement, dans une valorisation excessive de la paternité, à placer au premier plan les aspects de la créativité concrète, de l’expérimentation matérielle et scientifique, de l’autorité impérieuse, de la volonté tendue, de la domination par la force, de la rationalité prépondérante, de la délimitation d’un territoire, de la tutelle prolongée, de la mise en servitude, du travail à la sueur de ses bras, de la sévérité outrancière, de la légalité formelle, etc.  Il ne doit pas étonner que, pendant des millénaires, l’Humanité se soit conçue un Dieu à sa stature, bien que transcendant, au lieu de s’élever à la stature de Dieu.  Elle transigeait effectivement avec un Dieu qu’elle disait juste et parfait, mais sévère, jaloux, zélé, vindicatif, vengeur, irritable, véhément, autoritaire, arbitraire, autant de mots qui gravitent autour de la notion de rigueur et qui réfère aux faux maîtres, le Annunaki, oubliant que le Vrai Dieu est d’abord Amour, Clémence et Compassion.  Un tel Dieu, souvent dépeint comme un vieillard aux longs cheveux blancs et à la barbe d’une même venue, brandissant de façon menaçante ses Tables de la Loi ou prenant un air austère, souverain, condescendant, du haut de son Trône céleste, n’avait rien pour inspirer confiance, s’il inspirait le respect.  Cette caricature dépeint simplement le Recteur de Saturne, une Divinité mineure par rapport au Vaste Cosmos.

   Il existe toujours un danger à valoriser une polarité créatrice, car cela se fait toujours au détriment de l’autre. Voilà qui a, du reste, induit l’Humanité dans la guerre des sexes qui explique toutes les autres formes de guerre.  Dans la majorité des religions mondiales, on ne trouvait pas grand-chose qui pût pondérer les aspects mâles, virils ou masculins des Divinités suprêmes des divers Panthéons.  La femme, à qui on déniait nombre de libertés civiles, de droits légaux et religieux, à qui on refusait le droit de parole et de vote, le droit de tester et de signer des documents officiels, le droit de posséder des biens, notamment, sur qui on s’interrogeait à propos de l’existence de son âme et de sa pureté pour officier dans les cérémonies, était confinée à un rôle de servante qui devait tenir le foyer, se soumettre aux caprices de son mari et enfanter dans la douleur.  Elle était considérée comme la vile tentatrice impure, demi-portion d’Adam, mais douce moitié de l’homme, qui avait entraîné l’Humanité dans sa Chute et dans sa misère, d’où elle devait se voiler pour éviter de corrompre les mœurs du mâle, trop centré sur son sexe.  Aussi sa sexualité apparaissait-elle menaçante, son comportement irresponsable, son caractère hystérique et son cycle de fertilité, qui en faisait une impure, inquiétant.

   L’Humanité ne connaîtra pas l’équilibre, l’amour, l’harmonie et la paix tant qu’elle n’aura pas accueilli la femme dans sa grandeur et sa dignité comme une partenaire de l’homme dans l’égalité détenant, face à lui, un rôle différent, mais simplement compatible et complémentaire.  Elle n’a pas réussi à redécouvrir le Paradis perdu parce qu’elle a trop œuvré avec un Dieu, Père et Créateur, qui n’était que la Moitié de sa Réalité sublime, par que Dieu est essentiellement Père-Mère, puisqu’il détient en lui-même les deux polarités créatrices par lesquelles il a engendré le Monde multiforme.  En tant que Source de toute Vie, Dieu est l’Androgyne primordial qui fusionne en lui les deux courants d’énergie mâle et femelle, électrique et magnétique, actif et passif, négatif et positif, solaire et lunaire.  Par son aspect paternel, il est l’Essence, l’Esprit, le Créateur, l’Être suprême, la Rigueur. Par son aspect maternel, il est la Matière subtile, la Intelligence, l’Organisateur du Monde, la Créature unique, la Miséricorde ou la Clémence.  Le Père conçoit l’Idée et le Plan tandis que la Mère les organise, les réalise, fournit les matériaux pour les rendre manifestes.  Le Père désigne la Sagesse amoureuse ;  la Mère, l’Intelligence amoureuse.  Ainsi peuvent apparaître et se côtoyer dans la cohésion la Sagesse, l’Amour et la Vérité.

   Ce qu’il importe de retenir de ce préambule fort philosophique, c’est que le Christ, le Fils de Dieu, le Dieu-Homme ne peut apparaître que lorsque le Père et la Mère s’unissent dans l’Amour en tant que Principes respectifs de la Sagesse et de la Vérité.  Bien sûr que nul Homme ne peut parvenir au Père sans passer par l’état christique, mais nul Homme ne peut réaliser l’état christique sans passer d’abord par la Mère qui, seule, peut le présenter au Père.  Autrement dit, avant de rencontrer l’Essence, l’Energie primordiale, d’une Puissance infinie, il doit être dûment préparé par la Mère.  Du reste, tous devront l’admettre tôt ou tard, puisque le Père désigne l’Energie primitive, transcendante, silencieuse, non manifestée, il ne peut créer seul, car il est inséparable, dans son activité, de la Mère, sa Moitié céleste.  De la même manière, sans le Père, la Mère, l’Energie manifeste de Dieu, ne peut exister.  Le Père et la Mère n’existent que dans leur union mystique ou spirituelle, forcément indissoluble et perpétuelle, car c’est d’une telle union seulement que le Christ, la Conscience qui fusionne le Ciel et la Terre, peut apparaître.

   Qui veut être christifié pour réintégrer le Royaume doit passer par la Mère qui, après l’avoir formé, nourri, instruit, soigné, guéri, lui avoir prodigué ses soins, son amour, sShivaIIa tendresse et ses caresses le présentera au Père.  Nulle créature ne pourrait entrer en contact direct avec le Père, l’Essence pure et originelle, sans être immédiatement dissout dans sa Subtilité et sa Puissance.  D’ailleurs, ce Père, le Moteur premier non mu qui meut tout, possède des attributs trop transcendants pour être perçu et atteint en lui-même.  Ne le dit-on pas impersonnel, impassible, impermanent, immuable, impartial, immuable, immutable, impénétrable, impératif, imperceptible et le reste, bien qu’il soit omniscient, omnipotent, omniprésent et omniagent ?  Comment l’Homme peut-il espérer être perçu, reçu, compris, entendu par l’Etre-Un ?

   Mais la Mère, elle, qui est Substance subtile, Véhicule sensible, Coupe réceptive, Oblation suprême, Vase d’élection et d’intuition, Nourrice du Monde le peut.  Car la Mère représente justement tous les attributs divins de la Féminité idéale : maternité, fertilité, soins, beauté, grâce, élégance, raffinement, civilité, attention, tendresse, vigilance, protection, sociabilité, éducation, douceur, bonté, amitié, sensualité, accueil, don, abandon, acceptation, adaptation, gestation, communication, esprit de service, altruisme, diplomatie, consolation, responsabilité des relations, gentillesse, désir de plaire, compréhension, magnétisme, exploration de l’inconscient et des couches profondes de l’âme, reconnaissance de la légitimité, subjectivité, compassion, clémence ou miséricorde, pitié, intelligence, abnégation, dévouement, etc.  Elle est parfaitement munie pour comprendre les créatures terrestres et célestes, la plus soucieuse du bien-être et du bonheur de chacun, très apte à gérer la famille et le Monde et à le faire avec empressement et sollicitude.  Elle sait comment accueillir tout être dans ses besoins légitimes et ses désirs licites, comprenant même ses caprices et ses  fantaisies, car elle sait que celui qui est affamé de nourriture ou de biens n’a pas d’oreilles pour entendre le Père qui l’appelle à retourner chez-lui, dans la Maison sublime.  Quant à la Mère, elle gère avec compétence et sollicitude, de façon tutélaire, et le foyer terrestre et le Foyer spirituel.  N’est-il pas naturel de croire qu’il vaille mieux passer par elle pour comprendre le sens de l’Evolution humaine?  (L’illustration de droite représente Shiva, le Bleu.)

Dourga, la Mère universelle ou cosmique

   Dans la Tradition hindoue, Dourga représente la Mère divine, la Nature naturante, la Shakti universelle à titre de parèdre (compagne ou épouse) de Shiva, le Père divin, la Réalité suprême, la Sagesse divine, l’Intelligence supérieure, la Vérité absolue, l’Infini éternel, le Bienfaiteur universel, le Logos primordial, l’Arbre cosmique ou central, le Fécondateur du Monde, la Volonté divine qui Dourga-sculptureprofère le Son de Vie.  En raison de ses attributs ambigus et paradoxaux, comme on le verra, certains la redoutent, lui prêtant des intentions maléfiques ou des influences pernicieuses, car elle intervient souvent comme la Mère sombre qui détruit les Serpents et le Mal cosmique.  Pourtant elle n’est rien d’autre que la Mère sacrée, le Vase de réceptivité, la Matrice universelle, la Déesse magnifique de la Paix et de la Béatitude qui purifie les Mondes impurs ou souillés, les tirant de leur Âge noir, pour les faire accéder à un Nouvel Âge d’Or.  Il s’agit en fait de «Parvati», la parèdre de Shiva, dans son aspect magnétique et sombre de Divinité féminine dite «inaccessible» ou «difficile à conquérir», soit la Femme idéale, éternellement vierge, chaste et pure, celle qui se voile à l’impur et à l’imposteur, que rien ni personne ne peut blesser.  Cette Grande Dame divine, d’accès difficile pour celui qui s’illusionne ou manque de pureté d’intention, peut devenir la Guerrière ou la Chasseresse impitoyable pour celui qui témoigne d’irrespect pour la Vie cosmique dont elle est la Manifestation originelle.  À la fin de toute ère patriarcale, dans un monde ou un autre qui est dominé par les hommes, elle s’incarne dans un corps de femme virile ou d’homme gracieux pour opérer un redressement de la situation.  Car c’est elle qui donne la vie, mais aussi la dévore, quand elle prend une orientation rétrograde ou se déséquilibre.  Elle affectionne particulièrement la personne mystique ou spirituelle qu’elle protège de toute sa puissance contre ses ennemis, car elle mène une guerre sainte contre les impies, les imposteurs, les dénigreurs et les profanes.  Elle fournit l’Énergie propulsive de l’Illumination ou de l’Ascension à celui qui l’honore, la révère et la sert de façon loyale, sincère et désintéressée.  Reliée à l’aspect mental de la Vie, elle vivifie l’intellect, clarifie l’esprit, aiguise la mémoire, facilite les acquisitions, stimule la créativité.  Mais, quand on la contrarie, elle se revêt de rouge, prend un regard menaçant terrible, empoigne son glaive flamboyant, parmi nombre d’autres attributs omnipotents, monte son lion féroce, pour intervenir à l’Armageddon où elle sort toujours victorieuse de la guerre qu’elle a suscitée.  En effet, c’est elle qui régit les Anges de la Sanction ou de la Rétribution.

   La Mythologie hindoue raconte ainsi sa naissance…  Un jour, l’Asura Mahishasura, le Buffle terrifiant à la peau verte, se présenta devant le Palais du Roi Purandara, en possession de ses armes de fer, avec ses armées démoniaques montées sur des chars et accompagnées de phalanges d’éléphants, pour le détrôner du Ciel et prendre sa place, ce qu’il réussit à faire.  Sa victoire fut si complète que tous les Dieux partirent d’eux-mêmes en exil, se réfugiant auprès de Brahma, Vishnou et Shiva.  Là, ils se plaignirent en disant : «Nous avons été dépossédés du Ciel, notre Demeure.  Comment peut-il se faire que le Ciel soit rempli de Démons maléfiques?  Comment un tel lieu peut-il encore s’appeler le Ciel?»

   Après avoir entendu les plaintes des Dieux, le visage du Seigneur Vishnou, le très compatissant, s’empourpra de colère et il en jaillit une brillante lumière.  En un rien de temps, les visages des Seigneurs Shiva et Brahma s’enflammèrent de la même lumière fulgurante.  Les Dieux ne purent rien faire d’autre que d’observer la scène avec étonnement puisque les flammes s’amplifièrent et se répandirent dans toutes les directions pour illuminer les trois mondes : le Ciel, la Terre et le Monde souterrain.  L’énergie de toutes ces flammes finirent par converger en un seul point où elles fusionnèrent.  Alors, Shiva en surgit transformé en une jeune femme dont la tête était formée de son énergie, ses dix bras de l’énergie de Vishnou et ses jambes de l’énergie de Brahma.  Tous les Dieux dépossédés furent attirés par elle, d’où ils ne purent s’empêcher de lui offrir des présents divins.

   Ainsi, Pinakadhrik lui remit un Trident ;  Krishna, un Disque ;  Varuna, une Conque ;  Anti, un projectile ;  Vayu, des Flèches ;  Indra, un Foudre ;  Airavata, une Cloche ;  Yama, une Baguette ;  Soma, un Nœud coulant ;  Kubera, une Hache et un Bouclier ;   Himavat, un Lion magnifique comme monture de guerre ;  et d’autres, des Joyaux d’or.   Ainsi armée de terrifiante façon, Dourga se prépara à partir au combat, gracieusement montée sur son animal.  Elle rugit comme le tonnerre, ce qui ébranla les trois Mondes : les Océans se mirent à bouillir et leurs vagues furent projetées sur les terres ;  des continents se détachèrent de leurs fondations de granite et des chaînes de montagnes entières en surgirent, tandis que des vielles chaînes s’effondrèrent ;  des nuages de poussière montèrent de toutes parts.  Ces cataclysmes, produits du Ciel à la Terre, attirèrent l’attention de Mahishasura et de ses démons alliés.  Mais, certains de leur force et maîtres du Ciel, ils ne purent que s’étonner.

   Tous ces Entités maléfiques n’eurent pas grand temps pour admirer le visage rayonnant de leur nouvelle adversaire, quand elle se présenta devant eux, car elle déclencha immédiatement son attaque furibonde.  Elle fit d’abord face aux armées de Chikasura et de Chamara qui furent rapidement détruites.  Bien qu’il vînt de perdre son commandant en chef, Mahishasura persista à croire en sa supériorité.  Ne possédait-il pas sa propre armée de féroces Démons en réserve ?  Lorsqu’il constata enfin les résultats de l’avancée de Dourga, qui semait la panique et la destruction partout sur son passage, il devint évident pour lui qu’il devait engager jusqu’à sa garde personnelle, s’il n’entendait pas être chassé du Ciel ou subir un pire sort encore.  Il lança donc sur le champ de bataille sa collection la plus étrange de soldats d’élite et de vassaux, ses hordes d’infanterie joyeusement parées de leurs inhumaines armes, des haches et des hallebardes de fer, des gourdins menaçants, qui avançaient à côté d’escadrons d’archers démoniaques.  En première ligne s’avançait un cortège de charge désespéré et furieux formé de milliers de conducteurs de chars et toute une cavalerie de chevaux et d’éléphants.

   Mais Dourga, supportée par des hymnes de louange,  les chants de vénération, les sons de cors et les battements de tambour, rôdait de çà et de là sur le champ de bataille, toujours élégamment montée sur son lion, renouvelant sans cesse son armée de son Souffle vivifiant, créant spontanément des guerriers toujours plus habiles, braves et résolus.  Brandissant sa cloche, elle sema la confusion parmi les Démons, dont plusieurs finirent ligotés et enchaînés.  Avec son épée magique, elle les tailla en pièces.  Son avancée fit tant de victimes qu’un fleuve de sang se forma sur la plaine, recouverte de membres épars et de morceaux de corps de l’armée défaite des Démons.  Alors, les commandants des Démons l’attaquèrent, qui furent instantanément tués sans la moindre pitié.

   Mahishasura, le Roi des Démons et usurpateur du Trône du Ciel, fut choqué, voire enragé de ces événements désastreux.  Il se transforma en un Buffle énorme et chargea à gauche et à droite sur le champ de bataille.  Puis, il fondit sauvagement sur les soldats de Dourga en encornant plus d’un, en mordant certains, en assommant d’autres avec sa longue que en forme de fouet.  Quand il parvint enfin en vue de Dourga, il mit son lion dans une telle fureur, à cause de son comportement inique, qu’il fut attaqué par lui.  Dans cet élan, la Déesse lança sa corde à nœud coulant dans la direction du Chef des Démons qui, pour échapper à sa manœuvre, se transforma lui-même en lion.  La Déesse attrapa l’animal par la tête, mais celui-ci se transforma rapidement en homme.  Sans hésiter un seul instant, la Grande Dame décocha vers son ennemi une volée de flèches acérées.  Une fois de plus, le Démon usa d’astuce, se transformant en un gigantesque éléphant qui chargea son lion d’une défense.  Dourga la frappa violemment de sa hache jusqu’à ce qu’elle tombât.

   De plus en plus affaiblit, le Chef des Démons décida de reprendre sa forme originelle de Buffle sauvage.  Il battit en retraite dans les montagnes d’où il se mit à lancer des grosses pierres, des moraines entières, sur Dourga.  Alors, la Reine de l’univers s’abreuva du Nectar divin que lui avait donné Kubera.  Elle bondit sur Mahishasura et le cloua au sol de sa jambe gauche.  Elle lui saisit la tête d’une main et le transperça du javelot pointu qu’elle tenait dans une autre main.  D’une autre de ses dix mains, elle brandit son épée brillante et le décapita. Enfin, le Grand Adversaire tomba, se transformant en jeune buffle.  Prenant un regard triste et piteux, il invoqua la pitié de la Maîtresse du Ciel et de la Terre.  Mais voilà, Dourga n’est pas femme à s’apitoyer sur le sort d’un impie.  Aussi, enleva-t-elle ses bottes de guerre et asséna un violent coup de son pied nu à l’animal terrassé.  Le Démon fut tué instantanément pendant que les rares survivants de son armée présumément invincible s’enfuyaient pris de terreur.

   Voilà comment les Dieux purent retourner au Ciel, accompagnés des Sages de la Terre, en chantant les louanges de Dourga.  Depuis, la Déesse Dourga est vénérée par tous les Dieux du Ciel, tous les hommes de la Terre et toutes les créatures de l’Univers.  Tel qu’il l’avait demandé, Mahishasura s’y trouve aussi, figé dans la pose qu’il avait prise au moment de sa mort, empalé de la lance de Dourga, prostré devant son pied gauche.

 

Le «Navaratri», le neuvaine des «neuf nuits» ou le Festival annuel de Dourga

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   En fait, Dourga représente la dimension infinie de l’univers. Elle symbolise aussi le dynamisme de la Femme cosmique.  Lors de la célébration du Durga Pooja, les dévôts chantent ces deux lignes, tirées des versets sanskrits («shloka») : «Ya Devi Sarvabhuteshu Shaktirupena Samsthita, Namostasyi, Namostasyi, Namostasyi, Namonamah…». Ce jeudi, de nombreux fidèless de foi hindoue débutent le jeûne et commencent à adresser des prières à la Déesse Durga, une Divinité féminine aussi connue sous les noms de «Parvati», «Ambika» et «Kali», la Femme sans peur qui se déplace vers la Terre, montée sur un lion qui, les jours de guerre, tourne au rouge scintillant. Comme plusieurs autres fêtes observées par les hindous, le «Dourga Puja» marque simplement la Victoire de la Lumière sur les apparentes Ténèbres de l’Univers.Le Navaratri (qui signifie les «Neuf Jours») constitue le Festival annuel de Dourga, l’une des fêtes les plus sacrées des Shivaïtes hindous, la plus célébrée après le Maha Sivaratri.  Ce Festival spirituel honore Shiva dans sa forme de Parashakti au cours des neuf nuits qui suivent la Nouvelle Lune de septembre.  Alors que le Maha Sivaratri rend hommage à Parasivam, le Père divin non manifesté, le Navaratri célèbre Dourga, la Shakti manifeste de Shiva, la Mère universelle, sa fidèle et chaste épouse éternelle, inséparable de lui, liée à lui dans une union mystique indissoluble.  De même que Brahma, Vishnou et Rudra ne sont que trois aspects de Shiva, le Dieu unique, ainsi Sarasvatî, Lakshmi et Dourga sont les trois aspects de Shakti, la Déesse suprême.  Les bras multiples d’une divinité représentent ses principaux attributs divins et absolus.

   Au cours de ce Festival, les trois premiers jours sont consacrés à DOURGA elle-même qu’on prie pour recevoir la force, la santé et la destruction de ses impuretés.  Pendant les trois jours qui suivent, on vénère LAKSHMI de qui on requiert de remplir sa vie de beauté, d’abondance, de tranquillité, de sérénité, de paix.  On dédie les trois derniers jours à SARASWATI dont on attend la créativité, l’érudition, la culture et les talents artistiques.  Au dixième jour du Festival, appelé Vijaya Dasami, on se réjouit que la Vérité et le Bien triomphent universellement et on rend grâce pour les bienfaits obtenus au cours de l’année antérieure. La Tradition shivaïste veut qu’il soit d’excellent augure de lancer une nouvelle entreprise ou un projet nouveau, particulièrement en éducation, en culture ou en art, en cet ultime jour du Festival de Dourga.

   Pour nombre de mystiques du Monde entier, Dourga n’est nulle autre que la Déesse unique dont toutes les autres divinités féminines de la planète et de l’Univers ne sont que des aspects.  Il n’est donc pas étonnant que, tout au long de son Festival, on l’associe à des divinités féminines moins célèbres qu’elle, mais qui n’en constituent pas moins ses manifestations majeures.  On croit que, pendant ces neuf jours sacrés, la Déesse-Mère s’occupe de dissoudre tout le mal du Monde et des foyers qui l’honorent et qu’elle affermit le Dharma, soit la Religion unique ou la Loi suprême qui soutient, alimente et supporte l’Univers.

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   Au premier jour, on célèbre SHAIPUTI, fille d’Himavan, la Déesse aux deux mains, la gauche tenant un lotus et la droite un trident, montée sur un taureau, la monture de Shiva (ou Çiva).

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   Au deuxième jour, on fête BRAHMACHARINI, la Déesse probe et pure, représentée debout avec deux mains, la gauche tenant un pot à eau et la droite un mala ou chapelet hindou, personnifiant l’amour et la loyauté.

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   Au troisième jour, on honore CHADRAGHANTA, la Déesse à la peau dorée, aux dix bras et aux trois yeux, montée sur un tigre.  Huit de ses mains portent des armes spirituelles ou magiques, tandis que les deux autres tracent respectivement le mudra d’accorder un bienfait et celui de mettre un terme au mal.  Elle est reliée à la Lune.

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     Au quatrième jour, on vénère KUSHMANDA, la Déesse à l’Aura solaire (doré), dotée de huit bras, qui porte des armes spirituelles, dont un mala.

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   Au cinquième jour, on s’adresse à SKANDAMATA, la Déesse aux trois yeux, montée sur un lion, qui tient son enfant sur son sein.  Elle est dotée de quatre bras, dont deux tiennent un lotus, les deux autres exprimant les mudra de la défense et de l’offrande d’un bienfait.

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   Au sixième jour, on invoque KARTYAYANI, la Fille divine du Sage Katya, la Déesse aux trois yeux montée sur un lion et présentant de ses huit bras des armes de combat.  Cette Déesse au teint doré régit l’Ordre et l’Équilibre.

Au sDourga7eptième jour, on s’associe à KALARATRI,  la Déesse à la peau noire et aux longs cheveux de jais, qui monte un âne docile.  Deux de ses mains tiennent respectivement une machette et une torche pendant que les deux autres tracent le mudra du don et celui de la protection.

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   Au huitième jour, arrive le tour de MAHAGAURI, la forme de Dourga la plus suave et la plus douce, avec son teint pâle, le Déesse de la paix et de la compassion, asociable à l’Orientale Kuan Yin.  Vêtue d’un sari blanc ou vert, la tunique indienne, elle monte un bœuf robuste et docile, présentant un tambour et un trident.

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   Enfin, au neuvième jour, on révère SIDDHIHATRI, la Déesse blottie dans un Lotus, comme si elle en surgissait, offrant au regard quatre bras armés.  Elle détient vingt-six vœux qu’elle ne souhaite que partager avec ses dévots (vénérateurs ou fidèles).  Elle régit les pouvoirs spirituels, l’accomplissement, la réussite, le succès, l’expansion.

   Dans certaines grandes villes de l’Inde, le Festival du Navaratri se termine souvent par une procession au cours de laquelle on porte une statue de papier mâché et de carton à la peau noire, mais au sari éclatant, montée sur un brancard, qu’on porte sur la berge d’un fleuve (notamment du Gange) et qu’on lance sur l’eau, à la dérive, après l’avoir chargée de ses requêtes pour l’année qui vient et de ses misères pour qu’elle les apporte avec elle dans son retour vers sa Demeure, au centre de la Terre ou au plus haut des Cieux.  Partout, on la considère comme la Grande Protectrice de l’Univers sur tous les plans de conscience.

   Au dire des Maîtres de Lumière, Dourga est l’aspect de Dieu présentement le plus actif sur la Planète Terre pour la purifier, l’harmoniser, la délivrer de l’emprise des Forces du Mal, afin de lui assurer une transition heureuse et certaine dans le Nouvel Age de Diamant.  Il paraît qu’aucune autre Émanation divine ne désire autant qu’elle la réalisation des créatures de la Terre dans le Bonheur et la Félicité, comblés à tous égards dans leurs besoins légitimes et leurs désirs licites.  Ainsi, prier Dourga, c’est s’attirer la complicité tutélaire et bienfaisante de toute la Hiérarchie divine et s’assurer la victoire en tout lieu et en toute circonstance.  Il lui arrive de paraître sévère et exigeante, mais toujours pour la réalisation supérieure de celui qui la prie pour le libérer de ses illusions, de ses faiblesses, de ses limites et de ses entraves.  Une fois qu’on s’est concilié ses faveurs, on peut toujours compter sur son amour loyal, constant, sincère et indéfectible.

   Alors, qui mieux qu’elle peut ramener les Enfants du Père perdus dans le Royaume originel, le Foyer éternel?

© 2010-16, Bertrand Duhaime (Dourganandâ).  Tous droits réservés. Toute reproduction strictement interdite pour tous les pays du monde.  Publié sur : www.larchedegloire.com.  Merci de nous visiter sur : https://www.facebook.com/bertrand.duhaime.

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