À QUOI SERT LA THÉOLOGIE DANS UN MONDE OÙ TOUS LES HOMMES PRÉSENTENT DES GRANDEURS ET DES FAIBLESSES APPARENTES?

Dans toutes les religions, comme si Dieu était un être rationnel, la théologie désigne l’étude relative à la divinité ou à sa logique et, par extension, celle de la religion ou de l’évolution spirituelle, une étude souvent publiée dans des livres qui remplissent les bibliothèques des séminaires et des facultés des universités confessionnelles.  Ce mot peut aussi désigner la doctrine religieuse ou spirituelle d’un auteur ou d’une école.  Dans les religions chrétiennes, les sectes musulmanes et les communautés juives, cette étude porte sur Dieu et les réalités divines à la lumière de la présumée Révélation de Dieu lui-même à ses créatures.  On s’appuie donc sur les Textes dits saints ou sacrés qui exprimeraient le Verbe de Dieu avec sa volonté pour les hommes.

On peut définir la théologie comme un système organisant une religion de façon formelle à partir d’une tradition qu’on cherche à mieux comprendre à travers les époques.  Elle édicte des principes spirituels, codifiés en dogmes, en commandements et en préceptes moraux, qu’elle supporte d’obsetheologianrvances, theologien-chrétienimagesd’enseignements, de sacrements, de rituels et de cérémonies religieuses.  Son but devrait être de s’adapter à chaque époque, sans renier ses origines vraies, mais, en éliminant les spéculations et les interprétations par un retour aux textes authentiques et intégraux sur lesquels elle se fonde, apprenant à dépasser la lettre pour en trouver l’esprit.  Ainsi, elle pourrait devenir un ferment utile à la culture et à l’évolution de l’Humanité, pouvant épouser la sensibilité des gens et ainsi les motiver à pousser plus loin leur quête spirituelle pour adopter des valeurs plus élevées de manière à restaurer l’ordre social et à rétablir la cohésion cosmique.

Mais la théologie ne joue pas son rôle quand elle édicte des normes trop strictes, impose des concepts étroits, essayant de contrôler la liberté de pensée et de forcer à admettre son point de vue ou ses fins.  Qui peut se dire assez inspiré pour le faire?  Et l’individu ne peut-il pas être inspiré lui-même sur le sens à donner à sa vie si on lui apprend comment s’ouvrir à l’intuition?  Il est inadmissible qu’un clergé ou une caste sacerdotale se présentent comme les seuls interprètes et intermédiaires valables de la vérité divine.  Plutôt, ceux-ci doivent veiller à maintenir l’aspiration spirituelle dans le cœur des êtres humains en proposant des normes minimales, établies comme un dénominateur commun, applicables à la masse.  Pour le reste, ils peuvent s’occuper de la symbolisation rituelle de ces principes, si cela leur convient encore, pour entretenir une cohésion de cœur et d’intention chez leurs fidèles.  Mais ils se désavoueraient surtout en cherchant encore à exercer un pouvoir politique pour contraindre des gens à l’acceptation de leur doctrine.  La théologie se gargarise de mots, mais elle ne contribue pas à libérer l’être humain de ses souffrances ni à le rapprocher du salut.

Dans une prétention inouïe, nombre d’Églises professent détenir un rôle de maintien de l’intégrité de l’interprétation des Textes saints ou sacré et détenir la Vérité pour tous qu’elle présente dans un prêt-penser ridicule.  L’Église catholique, notamment, établit une concordance dans une doctrine commune venue du Christ qu’elle dit devoir sévèrement défendre contre les infiltrations étrangères, en fonction des erreurs et des hérésies à écarter.  Après les disciples de Jésus, elle dit détenir cette fonction à titre de gardienne de la succession dans la hiérarchie, avec l’assistance de l’Esprit-Saint, qui lui a été promise et accordée, à titre d’Église enseignante.  Ainsi, elle croit exprimer la Vérité unique et infaillible, d’après la voix des conciles ou les propos du successeur de Pierre, quand il parle «ex cathedra». Elle le croit au point de refuser d’argumenter avec qui que ce soit, croyant détenir le droit de se limiter à définir le vrai et d’écarter l’erreur, de déterminer et de proposer les données révélées, affirmant qu’elle ne lui ajoute jamais rien.  Au début de l’Église chrétienne, la grande masse des fidèles n’exprimait pas de préoccupation théologique.  Même les clercs, recrutés en grande partie dans les classes pauvres, sans formation intellectuelle, se contentaient d’admettre par la foi le contenu de la catéchèse évangélique.  Les chefs des églises défendaient le dogme par des décisions opportunes, contre les falsifications hérétiques.  Vers le milieu du IIe siècle, il en alla autrement, puisque des lettrés et des philosophes furent gagnés au Christianisme.  Alors, la foi dut être défendue par des arguments apologétiques.

Si ces arguments restèrent purs et conformes aux données traditionnelles, certaines spéculations apparurent aventureuses, voire inexactes.  À vouloir rendre les dogmes chrétiens par des formules empruntées de façon trop matérielle aux systèmes philosophiques qui leur étaient familiers, ces apologistes risquaient de fausser la notion de Dieu et de faire disparaître les différences essentielles de la nouvelle religion avec les anciennes.  À cause de certaines perversions du dogme, au contact des systèmes païens l’Église fut appelée à réagir en établissant progressivement une théologie positive.  En dehors des désaveux et des condamnations sommaires, elle lança des ouvrages polémiques pour s’attaquer au principe même de ces systèmes hétérodoxes.  On peut considérer Irénée comme le père de la théologie positive, cet évêque de Lyon, en France, qui écrivit un traité efficace intitulé Contre les Hérésies.  Il a fondé l’argument de tradition, l’élément clef de la théologie catholique.  D’autres textes des Pères de l’Église ont contribué à ramener la science et la philosophie dans de  justes limites et à préciser les dogmes catholiques.

Quant à la théologie de la religion musulmane, comme cette religion comporte également ses sectes, mais sans clergé ni hiérarchie trop structurés, pour assurer la cohésion de la pensée commune, elle donne lieu à des interprétations contradictoires qui peuvent se combattre à coup de «fatwas, ce qui n’est pas très rassurant ni pour la communauté ni pour l’humanité, comme l’histoire récente le démontre.  En passant, la fatwa, qui peut devenir politique et exécutoire, désigne un avis juridique donné par un spécialiste religieux de loi islamique, un «mufti», sur une question particulière, un avis émis à la demande d’un individu ou d’un juge pour régler un problème où la jurisprudence islamique manque de clarté ou de précision.  Bien que la fatwa ne représente pas forcément une condamnation et qu’elle ne soit pas reconnue ou suivie par une autre secte, elle s’impose dans des domaines variés comme les règles fiscales, les pratiques rituelles, les modes de comportement ou les choix alimentaires.  Dans la religion juive, ce sont les rabins, dont uimagesn bien petit nombre fait preuve d’extérmisme, qui s’occupent de donner l’orientation des messages et des interprétations de la Thorah.  Quant aux autres religions, elles accordent une grande liberté de pensée et elles se soucient assez peu de la conception individuelle de leurs membres.

Pour en revenir à la théologie chrétienne, celle-ci donna aussi naissance à une théologie spéculative pour corriger les arguments apologétiques qui n’avaient fourni que des répliques médiocres aux attaques des ennemis de la religion ou des hérétiques.  Celle-ci naquit surtout à Alexandrie pour préconiser que la doctrine du Christ est parfaite par elle-même, donc sans faille, et que nul ne peut rien lui ajouter, parce que rien n’y manque.  Elle n’en précise pas moins qu’il faut savoir l’interpréter, non d’après le sens personnel qu’on lui donne, ce qui amène à commettre des erreurs, mais selon la règle de la tradition ecclésiastique.

Ainsi, dans la majorité des religions, la foi devrait s’appuyer sur la recherche du sens des Textes saints pour en comprendre le contenu.  Peu à peu, la théologie rassembla en une synthèse organisée les principales vérités d’une foi particulière et elle tenta d’en fournir une explication ou une justification rationnelle.  Aujourd’hui, il reste à savoir à quel point Allah ou l’Esprit-Saint des Chrétiens a pu agir efficacement à travers ces hommes, des êtres incarnés comme les autres, porteurs de grandeurs et de faiblesses, qui se ne se voulaient pas moins  le lien privilégié entre les fidèles et Dieu.  En effet, toutes les théologies se fondent sur les mêmes motivations sincères et, apparemment, sur les mêmes critères d’authenticité, sans pouvoir échapper à leur certitude de détenir la Vérité unique et exclusive.  Ce faisant, elles morcellent et opposent vainement les Visages de Dieu, divisant les êtres humains qu’elles devraient rassembler dans l’Unité.

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En addenda, pour conclure sur le thème de la théologie, il pourrait intéresser qu’on définisse certaines expressions du vocabulaire religieux.  Ainsi, la théologie casuistique s’applique à résoudre les cas de conscience par les règles de la raison et des dogmes du Christianisme.  On la qualifie de sévère et, parfois, de subtilement complaisante.  La théologie de la libération évoque un courant chrétien qui met en avant les valeurs de l’Évangile comme fondements de la libération politique, sociale, économique et culturelle des peuples des pays en voie de développement.  La théologie des Pères renvoie aux conceptions des fondateurs de l’Église chrétienne.  L’auteur nommé Pseudo-Denys considère la théologie négative comme la théorie religieuse ou spirituelle qui nie que l’Essence divine participe à quoi que ce soit que portent les autres êtres, tandis que la théologie positive attribue à Dieu tout ce que sont les autres êtres, non pas comme s’il était ce qu’ils sont, mais au titre qu’il est leur Cause première.  La théologie scolastique réfère à un système spéculatif qui systématise de façon rationnelle les données fournies par la théologie positive, soit la connaissance des dogmes d’après l’Écriture sainte et les Pères de l’Église.

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