LA LICENCE DANS LE LANGAGE OU LES ACTES

Les écarts de langage, comme les actes apparemment offensants, servent souvent d’exutoire ou d’exorcisme aux frustrations personnelles, à un sentiment de révolte contre la société, à la désapprobation personnelle des insanités d’une époque.   Mais pourquoi les autres devraient-ils en faire les frais si elle traduit une surcharge personnelle de frustration?  On peut admettre que, dans leur aspect constructif, ils peuvent contribuer, à la manière d’électrochocs, à libérer le monde de ses frustrations ou de sa vulgarité, à le secouer dans son apathie ou sa torpeur qui l’amène à laisser passer le pire, une manière de lui rappeler forces-sombresà quel degré de conscience il a chuté.  En ce sens, certains ouvrages livresques ou certaines œuvres cinématographiques en viennent à servir de thérapie collective.

Les écarts de langage et les actes grossiers, ce qui inclut les propos grivois, les mots d’esprit vulgaire, les obscénités en paroles ou en actes, n’en attestent pas moins de symptômes d’une déviation du comportement sexuel ou social, au cours de son éducation.  En cela, tout ce qui rapporte aux excréments ramène d’évidence à un blocage au cours de la phase anale, celle de la formation à la propreté;  tout ce qui a trait au sexe, à un blocage à  la phase de la puberté;  tout ce qui renvoie au monde religieux, à un blocage dans la relation avec l’autorité, au cours de la phase de socialisation.  Chez l’être qui se complait dans ces écarts, ils traduisent son manque de maturité et d’authenticité qui l’amène à détourner une part de son énergie vitale, depuis l’une ou l’autre des phases de sa croissance psychique, et ils lui servent le message urgent de procéder à une transformation intime dans une sphère ou une autre de son développement antérieur.

Il faut pourtant dire que, comme moyen de se défouler, ce qui vaut mieux que de tout absorber comme un pantin ou une éponge, ces recours disgracieux, offensants pour ceux qui manquent d’équilibre et d’estime d’eux-mêmes, se démontrent moins néfastes que l’effort de se voiler entièrement son état psychique déficient.  Ainsi, sans recommander les écarts de langage ou les actes incongrus, il faut se demander qui est le plus hypocrite entre le mal engueulé qui se défoule ou l’être faussement vertueux, mais constipé, soit entre celui qui se défoule au fur et à mesure des frustrations ou celui qui s’en vexe et épassit son drame en aggravant son inhibition.

Non, le langage grossier ou ordurier, comme les actes insultants, ne sont pas beaux ni socialement respectueux.  Pourtant, tout être détenant le degré suffisant de matPiercing Horreururité ne peut penser à s’offenser d’un propos ou d’un acte qui ne sert qu’à condamner celui qui le profère plutôt que celui qui le reçoit.  Si quelqu’un dit à un autre qu’il est une merde ou s’il lui fait un doigt d’honneur, cela ne concerne que le beau parleur et nul adulte véritable ne penserait à prendre ces actes comme une atteinte personnelle.

Si quelqu’un lance une patate chaude à un autre, qui est le plus grand inconséquent : celui qui la lance ou celui qui s’empresse de la saisir et la garde dans ses mains au lieu de la laisser tout bonnement choir par terre?    Alors, a-t-on déjà pensé à ce fait que, dans ce genre de situation, tout sentiment d’offense résulte d’une association qui amène à prendre comme une attaque personnelle ce qui résulte d’un jugement inconséquent ou d’une intervention certes impertinente, mais qui, en principe, n’a rien à voir avec celui à qui elle était destinée?

De toute évidence, les propos d’un être, comme ses gestes, parlent de l’abondance de son cœur et ils le démasquent forcément.  Pourtant, l’esprit grossier ou ordurier, comme les actes déplacés, révèlent à son auteur que, pour le moment, il excelle dans le choix de se purifier et que, le jour où il aura expurgé son inconscient, il ne pensera même plus à recourir à ces moyens questionnables.  Pour le reste, en l’occurrence, celui qui est témoin de ses écarts ne se choque jamais qu’à partir d’une réalité qu’il porte en lui-même et qu’il réprouve.  Autrement dit, celui qui se vexe du degré de négativité du langage ou des actes d’autrui n’a pas moins de travail à effectuer sur lui-même que celui qui parle ou agit de manière incorrecte.

On oublie trop souvent que, pour saisir de mieux en mieux la vérité, l’humanité passe alternativement d’un extrême à l’autre, tant qu’elle n’a pas trouvé le juste milieu.  Car, pour la raison, qui manque parfois de nuances, si la vérité n’est pas dans un extrême, elle doit forcément se trouver dans l’autre, oubliant que l’équilibre ressort précisément de la neutralisation des extrêmes.  Ainsi, la vérité ne peut se loger dans aucun extrémisme, mais dans la conciliation des opposés apparents.  Cela a du bon dans la mesure que cette propension l’aide à se libérer de ses stéréotypes, de préjugés bien ancrés, de ses croyances ataviques, des chaînes de la tradition et de la culture.  Sauf qu’elle ne gagne rien à se cantonner trop longtemps dans ces extrêmes qui mènent à des abus graves.  Et c’est ce qui, après la perte du sens des valeurs des dernières années, tend à perdurer, dans un égocentrisme forcené et généralisé, par le recours à l’impudence, à l’absurde, au rigrabbing-crotchzdicule, à la médiocrité, à l’irrévérence, à l’irrespect, à l’amoralité, à la grossièreté, au dévergondage, qui tendent à s’ériger en mode et en système.

Ainsi, sans être prude, force est de constater que, chez le peuple, c’est désormais celui qui devient le plus téméraire, le plus osé et le plus vulgaire qui devient le plus aimé, le plus crédible et qui remporte partout les honneurs, au grand bonheur des Forces sombres qui avaient judicieusement planifié ce revirement de conscience délétère prématuré par le truchement de l’immaturité de la jeunesse qui, dans les dernières générations, régnait en roi dans tous les foyers, ayant religué leurs parents au rang de géniteurs silencieux et d’approvisionneurs serviles, après avoir réduit à l’impuissance toutes les autres formes d’autorité.  C’est cette même jeunesse narcissique qui ne témoigne d’aucun respect, même pour la propriété des amis, mais qui veille jalousement, vindicative, sur la sienne, comme sur tous ses intérêts, réclamant le meilleur de tous les mondes, en plus d’avoir fait de la laideur un critère d’originalité et des ténèbres un objet de quête existentielle.

Peut-être que le temps serait venu de commencer à remettre les choses à leur place en inventant de nouveaux repères fondés sur l’amour, la compassion, l’harmonie, le respect mutuel, la collaboration, la fraternité, la solidarité.  N’est-ce pas ce qui rapproche le mieux  de la Conscience de l’Unité?

© 2014-15, Bertrand Duhaime (Dourganandâ).  Tous droits réservés. Toute reproduction strictement interdite pour tous les pays du monde.  Publié sur : www.larchedegloire.com.  Merci de nous visiter sur : https://www.facebook.com/bertrand.duhaime.  

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